Fort l’Ecluse: L’éboulement de 1883

La chose paraît inimaginable, mais il fut un jour où le Rhône s’est arrêté, stoppé net par un énorme éboulement de terre et de rochers ! 

Cet événement exceptionnel s’est déroulé dans la nuit du 2 au 3 janvier 1883, tout près de chez nous, à quelques dizaines de mètres du Fort l’Écluse. 

À cet endroit, le fleuve est encaissé, cerné par les pentes du Jura et du Vuache. Les pluies incessantes qui tombaient depuis plusieurs jours sont à l’origine de cette catastrophe. 

C’est aux alentours de minuit qu’un énorme glissement de terrain s’est déclenché, avant de se poursuivre pendant plusieurs heures, entraînant dans le lit du Rhône la partie de la montagne située en amont du Fort l’Écluse. « L’éboulement emporta au passage 200 mètres de la voie ferrée reliant Lyon à Genève. Les terres meubles, le tunnel du chemin de fer de 45 mètres de long, tout fut entraîné, disloqué et s’effondra dans le fleuve », détaille Charles Lanthéric dans son ouvrage intitulé Le Rhône, histoire d’un fleuve. Si la catastrophe n’a pas fait de victimes, c’est en grande partie grâce à deux employés de la Compagnie des chemins de fer PLM, qui ont su promptement réagir face à cette situation dramatique. Le premier, « le vieux gardien de la voie », a couru du côté de Bellegarde pour arrêter avec des pétards un train de marchandise qui allait sombrer dans l’abîme. Quant au second, un dénommé Déconfin, journalier à Longeray, « il n’a pas hésité à traverser l’éboulement, en passant sur l’accotement d’une des voies encore en place, et en franchissant le tunnel de 45 mètres de longueur, emporté quelques heures après. Il a pu aller faire les signaux d’arrêt à un train qui, sans son intervention, aurait été précipité dans le vide », détailla le journal L’Officiel, dans son édition du 29 mars 1883. S’il assécha le cours du Rhône en aval, ce barrage naturel provoqua aussi un important lac artificiel en amont du fleuve, sur le territoire des communes de Collonges (Ain), Chevrier et Vulbens. Dans ce secteur, la catastrophe naturelle n’a heureusement pas fait de victimes, car l’eau est montée lentement, ce qui a permis aux riverains d’évacuer leurs maisons. 

Mais plus que ce lac provisoire, la grande crainte des autorités est que le barrage cède d’un coup, provoquant un terrible raz-de-marée qui aurait ravagé Bellegarde, Seyssel et toutes les villes en bordure du Rhône. « Dès l’aube du 3 janvier 1883, l’annonce d’une rupture du barrage naturel a causé dans les villes riveraines du Rhône, situées en aval du défilé de l’Écluse, une terrible anxiété. À Lyon, des mesures furent immédiatement prises pour faire évacuer les maisons les plus menacées, tandis que le pont de Sainte-Colombe était interdit à la circulation », relate dans son édition du 5 janvier le Journal de Genève. Mais heureusement, le drame attendu n’aura pas lieu, car la rupture du barrage formé par l’éboulement à Collonges a finalement donné une crue foudroyante de rapidité à Bellegarde, Seyssel, Culoz, mais qui n’a pas fait trop de dégâts. Le flot s’est ensuite affaibli en s’éloignant de son point de départ, préservant ainsi Lyon et les autres villes limitrophes du fleuve de ravages terribles. 

Source : Le Messager

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